26 août 2009

Le photographe Dominique Tarlé à la Galerie de l’Instant du Jour

Rendu célèbre pour ses clichés sur les Rolling Stones à la Villa Nellcôte, Dominique Tarlé expose ses photographies à Paris. Il sera présent le samedi 29 août 09 à la galerie. Donc, exposition photographique à ne pas manquer.


Aucun genre musical ne s’est autant nourri de sa propre représentation. Le rock est probablement la première forme artistique à avoir su communier aussi instinctivement avec le diable marchand (peut être aussi le cinéma). C’est sans la raison pour laquelle, Warhol, autre prophète de l’art-business, inclura un groupe rock dans sa Factory (le Velvet Underground pour les béotiens). Mais au delà du miroir de celluloïd, la vraie révolution musicale réside dans le fait que les photographiés sont les auteurs de leur art et de leur destin. C’est ce qui les rend si fascinant, c’est ce qui rend leur image aussi intense. Imaginer deux secondes, un photographe shootant Van Gogh errant, Rimbaud écrivant, Baudelaire dans les bouges, Villon dans le maquis… Enorme.

Venu pour une après-midi de shooting, Dominique Tarlé a vécu six mois avec les Stones composant et enregistrant ce qui allait être leur dernier grand disque (ça on ne le savait pas à l’époque) Exile on Main St., les derniers feux d’un groupe pivot du rock… Dominique Tarlé a regardé les Stones composer, s’engueuler, se défoncer, se marrer… (vivre quoi !) ; les attrapant au vol, sans préméditation, sans plan media… juste pour saisir l’indicible, les fluides, la magie. Et elle est là ; et elle se voit.

Mais, on ne peut pas réduire Tarlé à ce moment, aussi incroyable et riche qu’il put être. Il suffit de regarder ses autres photos de Jimmy Page, de Jimi Hendrix, d’Eric Clapton, des Who… Dans son angle d’attaque, on perçoit la quête du moment où le musicien se fond avec sa musique, devient Un avec son art.

Au milieu des années 70, Tarlé a senti le virage idéologique – c’est un intuitif – et a cessé de photographier ce qu’on appellera désormais les RockStars. La passion et les idéaux ayant laissé place au tiroir caisse et à la musique formatée (cf. notre article le Rock est mort en 77), Tarlé détournera ses objectifs. Seule pointe d’intérêt, le punk, dernier soupir d’une révolte musicale.

Q.U.

Les photographie de Dominique Tarlé sont exposées à La Galerie de l’Instant jusqu’au 3 1 octobre 2009
Présence de l’artiste à la galerie le samedi 29 août de 16h à 19h

La Galerie de l'instant
46 rue de Poitou
75003 Paris
00 33/ (0)1 44 54 94 09
http://www.lagaleriedelinstant.com/home

PS : pour ceux qui trainent à Saint-Rémy-de-Provence. Une exposition sympa des photos de Just Jaeckin. Cf. l'article "Just Jaeckin s’expose sans risque"



20 août 2009

Jackson C Franck, le martyr du folk – Blues runs the game – 1965

Il y a les grands noms du folk : Dylan, Joni Mitchell, CSN, Fairport Convention… mais aussi une cohorte de génies brulés devenus posthumément célèbres (Nick Drake) ou pas. Jackson C Franck appartient à la 2ème catégorie. Nous lui rendons hommage.

Le génie est-il implacablement lié à une vie gorgée de déceptions en tout genres, de flagrantes injustices, de félonies répétées et de court circuits contextuels empêchant un artiste de rencontrer son public ( l’inverse est également possible ) ?
On est tenté d’y croire. La vie d’un des plus talentueux songwriter de la scène folk en est l’exemple le plus parlant, la preuve la plus irréfutable.
C Franck, est un génie, mais un génie qui aurait dégusté les plats les plus ragoutants de la destinée avant d’entrevoir aussi courte qu’irritante le festin tardif d’une renommée qui n’entoure sa légende que depuis qu’il roupille à six pieds sous terre, ignorant la totalité de son indéniable influence, le culte indéfectible qu’on lui voue aujourd’hui.

Né en 1943, à Buffalo (Etat de New York), il passe sa petite enfance dans un coin de l’Ohio avant de déménager pour le lieu de tous les traumas : Cheektogawa. En effet, c’est là, dans une petite école, en plein cours de musique qu’un accident de chaudière provoque un incendie qui fera dix huit victimes et laissera le petit Jackson gravement blessé, profondément traumatisé – cloué pendant sept mois sur un lit d’hôpital. Pendant cette interminable convalescence, un professeur a l’excellente idée d’apporter au gamin plongé dans le désespoir une guitare toute neuve, histoire de tuer le temps et de ne pas sombrer dans la mélancolie, il s’y essaie, se sent tellement à l’aise qu’il se fera offrir une Gretsch électrique par sa mère, qui sachant également que l’enfant voue un culte insatiable à Elvis (déjà cloisonné à Graceland ) parviendra même à lui faire rencontrer son idole, bouleversé par l’expérience qu’a vécu le gamin. Un choc sans précédent et la certitude d’une vocation.

A 16 ans, il décide de devenir chanteur de rock, s’inscrit tout de même en école de journalisme pour assurer ses arrières mais touche cinq ans plus tard une somme redoutablement élevé, dédommagement par l’assurance de l’accident qui a failli lui coûter la vie. Il claque tout en bagnoles de luxes et costards d’un gout douteux. Des caisses, on vendrait les plus belles en Angleterre, il s’y rend, et pendant sa traversée de l’Atlantique griffonne dans un cahier les chansons qui construiront sa légende – (Dialogue, Milk and Honey, Carnival … ) Le fantasme des belles voitures est très rapidement remplacé par la découverte hallucinée de la scène folk londonienne, un vivier de talents exceptionnels parmi lesquels Tim Hardin, Bert Jansh, Fred Neil tiennent les mélomanes en haleine. De club en club, il finit par tomber sur Paul Simon, hébergé par une femme qu’il rencontre dans ses errances nocturnes – c’est le choc. Simon écoute la poignée de compos frétillantes que le roublard a déjà gribouillé ; Simon est estomaqué ! on tient peut être là un nouveau Dylan, sans perdre une minute, il lui promet de produire son premier album « Blue runs the games » lui fait enregistrer ses pépites et découvre au passage la personnalité très singulière du compositeur. Un type d’une timidité maladive et d’une excentricité qui cache une grande douleur. Peu importe, la mixture de Franck, folk mélancolique déployée sur une voix chevrotante (proche de Fred Neil par exemple) séduit rapidement et John Peel le diffuse fréquemment dans son émission légendaire de la BBC – les auditeurs en redemande et le succès pointe son museau dans la futaie des événements.

En 65, nouvelle grande rencontre, il tombe sous le charme d’une infirmière de 19 ans, Sandy Denny, ils sortent ensemble et lorsqu’il l’entend chanter une de ses propres compos, comprend assez rapidement qu’elle devra abandonner son métier pour se tourner intégralement vers une carrière de chanteuse, il n’aura pas tort, Sandy Denny au destin également tragique deviendra une des plus grandes chanteuses de folk mélodique (nous lui consacrerons un article prochainement).

Les concerts s’enchainent, la réputation s’affermit, jusqu’en 68 ou Franck apprend que les ventes de son premier album n’ont jamais vraiment décollé, largué par sa maison de disque, en manque d’inspiration et constatant que la mode du folk introspectif, jusque là prédominante, est en train de se dissoudre, il décide de retourner aux états unis où un nouveau drame lui vole son jeune fils, atteint d’une maladie rare. Sa femme le quitte également, il sombre dans la dépression. La descente aux enfers durera jusqu’aux années 90 où une lueur d’espoir viendra éclairer les trottoirs de sa triste déchéance en la personne de Jim Abott, un fou de musique qui parvient à retrouver l’artiste clochardisé et tente de lui faire arpenter le chemin des studios. Franck y croit mais il est très affaibli par une vie d’errances, d’internements, et de crises psychiques qui auront eu raison de sa résistance. Jambes ankylosées par des marches sans but, avec pour tout butin une valise pourri et une paire de lunettes cassées, sans oublier un œil en moins, perdu à cause d’un dingue qui jouait au Ball Trapp en longeant les bâtisses. Franck trouvera néanmoins grâce à son jeune protecteur (celui-ci parviendra à lui faire toucher des droits d’auteur sur la ré-édition de son premier disque) un répit de courte durée – jusqu’à la triste année 99 ; usé par son mode de vie tristement alternatif – son cœur le lâche le lendemain de son 56ème anniversaire. Reste son premier et seul disque, pour nous faire envisager ce qu’aurait été, si l’infortune ne s’était si cruellement attachée au destin de cet incroyable compositeur, la carrière d’un des talents les plus prometteurs des années 60.

Didier Boudet










17 août 2009

Robert Whitaker expose à Perpignan

C'est avec les Beatles que sa carrière de photographe s'enclencha durablement. Ce sont ses photos qui furent incluses dans la pochette Revolver conçue par Klaus Voormann et il fit les pochettes de nombreux 45T et la backcover de Oldies But Goldies! Mais son fait d'arme reste la pochette de la compil Yesterday and Today communément appelée "The butcher cover" qui fut censurée et retirée illico presto du marché américian (un collector maintenant, of course !).
Bien sûr, il photographia d'autres musiciens durant les sixties : Clapton, les Cream (photos utilisées aussi pour une pochette Disraeli Gears), Mick Jagger... avant d'aller cultiver ses terres dans le Sussex.
Alex Faraday

John Lennon with flower - 1965


Eric Clapton arborant la coupe Hendrix



La fameuse Butcher cover



12 août 2009

Le 40ème Anniversaire de Woodstock (Woodstock’s 40th Anniversary) Part 2

Il y eut des révélations durant ce festival. L’une d’entre elles fut le groupe formé par un jeune guitariste qui allait marquer l’histoire du rock, Carlos Santana. Armé d’un brillantissime batteur, Michael Shrieve, Santana allait faire découvrir à cette jeunesse la fusion rock.

Alex F.

11 août 2009

Le 40ème Anniversaire de Woodstock (Woodstock’s 40th Anniversary)

Le 40ème anniversaire de Woodstock approche – il s’est déroulé du 15 au 18 aout 69. Toutes les plus grandes stars du rock étaient présentes à l’exception des trois majeures : les Beatles, les Rolling Stones et Bob Dylan qui vivait à proximité du lieu – Led Zeppelin, les Doors et Joni Mitchell firent également partis des absents notables.

Arlo Guthrie ; Bert Sommer ; Blood, Sweat & Tears ; Canned Heat ; Country Joe and the Fish ; Country Joe McDonald ; Creedence Clearwater Revival ; Crosby, Stills, Nash & Young ; Grateful Dead ; Janis Joplin et le Kozmic Blues Band ; Jefferson Airplane ; Jimi Hendrix ; Joan Baez ; John Sebastian ; Johnny Winter & Edgar Winter ; Keef Hartley Band ; Melanie ; Mountain ; Paul Butterfield Blues Band ; Quill ; Ravi Shankar ; Richie Havens ; Santana ; Sha-Na-Na ; Sly & the Family Stone ; Sweetwater ; Ten Years After ; The Band ; The Incredible String Band ; The Who ; Tim Hardin se sont succédés sur une scène installée dans le champ de Max Yasgur, fermier à Bethel dans l’état de New York.

Nous reviendrons plus largement sur cet événement, sur les intervenants, sur le film (réalisé par Michael Wadleigh et monté entre autres par Martin Scorsese et Thelma Schoonmaker), sur les disques etc.

Pour l’heure, un petit extrait : une des chansons d’ouverture du film pas du festival qui propulsa Richie Havens. Il eut beaucoup de mal par la suite à rejoindre le firmament que lui avait tendu Woodstock. Richie Havens semble mettre tout ce qu'il a en lui dans Freedom.

Alex F.




10 août 2009

Carole King - Tapestry - 1971

Il y a une vie après la mise en musique de quelques immenses standards de la variété américaine (ceux des Shirrels, des Shiffons, des Drifters, de Bobby Vee…) il y a souvent une carrière, il y a pour sûr un chef-d’œuvre. Carole King (née en 47 à Brooklyn) peut en témoigner ; elle qui fut initialement compositeur et qui est devenue une chanteuse à part entière des années 70 au prix d’efforts qu’il est essentiel de vous narrer.


On a beau voir son talent unanimement reconnu à travers les succès éclatants que ses prestigieux interprètes (Aretha Franklin, The Monkees, The Everly Brothers… ) enchainent à longueur de juke-box ; vient un jour où l’on veut pour soi aussi récolter quelques louanges bien méritées, affermir sa réputation de compositeur inspirée, ne plus laisser les vocalistes interchangeables poser sur leur perruque en nylon les lauriers d’un génie qui n’est pas le leur et qui ferait presque oublier à l’auditeur galvanisé par le flot des succès mensuels qu’une mélodie pour devenir incontournable présuppose en amont un labeur d’une très grande exigence.
Carole est une de ses innombrables et talentueuses plumes de l’ombre, chétif rossignol de studio, picorant sans fin les graines éparses d’une notoriété chimérique, mais sérieusement décidée à prendre son envol. La jeune femme veut prouver au public qu’elle a autant de talent que les groupes pour lesquels elle cisèle patiemment ses chatoyantes compositions, autant, voire plus, mais les circonstances semblent se liguer contre son ardent désir.
Elle a formé avec son premier mari, Gerry Goffin, un des plus fameux duos d’auteurs de tubes de l’écurie Aldon Music tout comme Neil Sedaka & Howard Greenfield, Burt Bacharach & Hal David, Doc Pomus & Mort Shuman... Jusqu’au jour où sa rencontre avec James Taylor transforme sa vie professionnelle. Taylor la pousse à interpréter ses propres chansons. C’est aussi un signe des temps, depuis les Beatles, les interprètes sont aussi des auteurs !
Après l’échec cuisant d’un premier album aux tonalités encore hésitantes (Writer), elle commence à douter de ses capacités quand une identité musicale très spécifique se forme au même moment de ce côté-ci de l’Amérique, changement qu’elle saura discerner. Les harangues idéologiquement nébuleuses et les communions chaotiques des sixties finissantes ont fini par lasser. On se recentre sur le moi, on avoue ses fêlures, on veut du doux, du délicat, des airs mémorisables et des textes qu’on n’aurait pas honte de décortiquer entre un amour perdu et une idylle en devenir.
Carole est faite pour répondre à ces attentes ; la jeunesse des années 70 est, quant à elle, toute désignée pour se retrouver dans la charmante simplicité d’une jeune femme que son jeu spontané rend particulièrement attachante. Comprenant cela, elle se met au travail, s’entoure judicieusement, et voilà que sort TAPESTRY, son second disque. Ses motifs sans prétentions, ses images et ses clichés peut être, son absolu sincérité, sans aucun doute, arrivent à point nommé pour faire souffler un vent de liberté sur les chevelures détachées de ces mômes romantiques. Tout est frais dans ce disque, tout est neuf, tout respire un espoir dont les jeunes ont besoin pour discerner dans la brume une aurore enivrante. La raison en est simple : dans cette œuvre majeure, le collectivisme des années Hippie s’estompe pour une introspection tout en nuance que le style de Carole va incarner magnifiquement. Carole ose enfin écrire le quotidien, ne craint plus d’évoquer l’anecdotique. Avec une gaieté qui fait plaisir à voir, c’est pleinement qu’elle assume enfin la fraicheur de ses enthousiasmes adolescents, la tendre mélancolie de ses déboires sentimentaux. Un peu nasale, sa voix, avec un soupçon d’enfantine hésitation et de charmantes espiègleries seront la recette imparable de ces miniatures sans fioritures, discrètement appuyées dans cette nouvelle naissance par des musiciens à l’intuition redoutable, ceux que James Taylor conscient du potentiel de sa petite protégée lui prêtera généreusement pour affiner son entreprise et lui redonner confiance en elle.
Quand ce dernier la rejoint sur Far Away, (l’une des plus belles chansons de l’album signée Tony Stern) la jeune femme ne cesse de louer le talent du chevelu nonchalant, et le presse de venir la rejoindre pour magnifier les premiers accords dont son piano raisonne. Il lui doit bien ça, le grand James. Après tout, n’est ce pas à Carole qu’il doit l’une des plus belles chansons, le splendide You’ve got a friend. Cette chanson est avec les onze autres joyaux que contient cette caverne de tubes une délicieuse petite sucrerie à chiper dans un sachet dont les multiples ré-écoutes ne sauraient venir à bout, un joli motif soigneusement tissée à d’autres figures pour parfaire la tapisserie de nos faits et affects.

Didier Boudet



07 août 2009

Willy DeVille est mort

Mink DeVille fut une des grandes révélations du renouveau rock US au milieu des années 70 avec Talkings Heads, Ramones… Associé au mouvement punk, DeVille produisit un rock puissant et romantique, synthèse élégante du rock et de la soul avant de métisser la salsa et la musique cajun.

Meilleur album des Rolling Stones depuis Beggars Banquet, telle fut l’accroche de Philippe Manœuvre dans Rock & Folk pour la critique de Cabretta. C'était en automne 77. Faut dire que son premier LP produit par Jack Nitzsche fut une oasis en plein formatage et calibrage de la musique rock (cf. notre article "Le rock est mort en 77"). Amoureux de la France, William Borsay a choisi son patronyme en fonction et a titré deux de ses albums de noms français (Le chat bleu et Coup de grâce).
Pilier du CBGB à New York (cf. Live at CBGB), Mink DeVille enregistra dans sa première décennie sans doute les meilleurs albums de sa carrière sans pouvoir atteindre le public américain malgré un soutien critique - Le Chat Bleu fut désigné cinquième meilleur album de l’année par le magazine Rolling Stone et l’un des dix meilleurs albums rock de tous les temps par le rock-critique Glenn A. Baker. Willy deVille trouva néanmoins dans le public européen (et notamment français) un soutien indéfectible et sa reprise de Hey Joe en version mariachi lui apporta la reconnaissance hexagonale des plus réfractaires.

Q.U.

Spanish Stroll from Cabretta




David Bowie et la France

En 77, Bowie est une énorme star en Angleterre et commence à percer durablement aux US. Paradoxalement, le Thin White Duke est quasi inconnu en France. Alors, il passe voir Michel Drucker un dimanche après-midi. Mon Dieu comme il est beau, Bowie !

Début 72, l’Angleterre est touchée par un revival fifties à paillettes, le Glam Rock ! Slade, Sweet, Gary Glitter en sont les principaux représentants avec, un cran au dessus, Roxy Music et T. Rex et bien évidemment, David Bowie dans l’une de ses plus fameuses mutations (cf. la trilogie Ziggy Stardust, Aladin Sane, Diamond Dogs).
Le Glam évaporé, Bowie emprunte de nouveaux chemins, mais n’exerce pas en France. Il traverse l’Atlantique en paquebot – il a peur de l’avion- et y obtient un succès nettement plus convaincant que Roxy ou Mac Bolan. Son premier vrai hit est une chanson co-écrite avec un expatrié de renom, John Lennon. Fame s’empare de la première place du billbooard en 75. Coup de maître !
Bowie se souvient de la France, lui l’homme raffiné, et il y apparaît en Thin White Duke - peut être pas un hasard - son nouvel avatar pour l’album Station to Station. Un concert est donné, son premier en France, aux Abattoirs de la Villette en 76 (une faute de goût ?). La salle est pleine. C’est une gageure, car Bowie est un OVNI pour les français. Le Glam Rock fut pour eux un truc pour gays et minets dont Patrick Juvet s’empara. Le virage soul de Young Americans fut incompréhensible, les français méconnaissaient la musique noire de Philadelphie. Station to Station, un album pour une chapelle.
Heroes, opus post punk alliant sophistication et modernisme, conquit les français et Michel Drucker (il y eut même une version en français du titre éponyme). Faut dire qu’une alchimie nouvelle se déclarait en France : punk + ouverture des médias à la culture rock (presse, TV et radio). Et voici, notre beau David sur les plateaux de TV hexagonal. Début d’une histoire d’amour ?
Drucker, pas encore 60 ans de TV, patauge dans son anglais de fortune et calcule mal la star qu’il a devant lui (car il y a quand même deux artistes qui ont dominé les années 70 au Royaume-Uni : David Bowie et Elton John.) Drucker oscille entre questions pro et franchouille sympa. Bowie est courtois, doux, presque accessible. Il répond comme un gentil garçon sans morgue ; il comprend la situation. Ses cheveux courts, son absence de maquillage outrancier et son apparente simplicité le rendent terriblement séduisant. Lui qui a flirté avec toutes les limites, tous les excès, qui a accompagné toutes les expériences musicales seventies en les parachevant comme savent le faire les très grands : Miles Davis, Picasso…
Après le show TV, Bowie donnera deux concerts aux Abattoirs (eh oui, encore !) en 77 dans le cadre de la tournée de promo de l’album Heroes. Concerts inoubliables – un double live, Stage, soutira peu après (nous y reviendrons).
Ensuite, Bowie reviendra en France souvent et il s’envolera vers le firmament des stars mondiales avec « Let’s dance ».

Q.U.




Speed of life
from Stage


What in the World
from Stage


05 août 2009

Crystal Gayle - Don't It Make My Brown Eyes Blue

Durant la même soirée des Grammy dont nous avons parlée récemment, Crystal Gayle, pas encore l’interprète de la bande son d’un des plus beaux films de FF Coppola, One from the Heart, nous livre l’un de ses plus grands tubes "Don't It Make My Brown Eyes Blue". Fermez les yeux et savourez. Bon je sais, c’est de la variété ; mais bon…




Crystal Gayle & Tom Waits : This one's from the Heart



03 août 2009

Le rock est mort en 77 (Part 1)

Crosby, Stills and Nash aux Grammy Awards de 1977


Ce moment est assez curieux. Crosby, Stills and Nash, trois acteurs symboliques de la contre culture de la fin des sixties, présentent le meilleur album de l’année aux Grammy Awards de 1977.

Quelques années auparavant, CSN ont eu la finesse de créer des « protest songs » aux paroles poétiques mais accessibles sur des mélodies sophistiquées et accrocheuses. Ils ont intégré à leur composition quatre genres majeurs : le folk, le rock, la country et la pop. Le tissage habile de leur voix aux tessitures différentes est devenu leur image de marque. Ils ont réussi commercialement là où Dylan a échoué. Nous les voyons ici en Tuxedo faisant les pitres devant le showbiz comme des enfants disciplinés. Que s’est-il passé entre Woodstock (69) et ce moment de 77 ? Leur carrière est en déclin, ils vivent sur leur image et évoquent avec humour celui qui n’a pas renoncé, Neil Young.

Tout aussi intéressants sont les albums nominés :
- Aja de Steely Dan qui vient atteindre la forme musicale après laquelle Fagen et Becker courent depuis 10 ans : un groove sophistiqué de rock aperçu par un monocle jazzy… L‘intelligence ne fait de mal à personne.
- JT de James Taylor qui caressait pour la dernière les charts US avec le tube opportuniste « Your smiling face », dernier coup de reins avant l’obscurité.
- Hotel California des Eagles, le gros carton de l’année, ce qu’aurait pu devenir CSN, de la variété dylanienne qui flatte l’American Way of life.
- Rumors de Fleetwood Mac, l’album emblématique de la musique californienne, énorme carton également, produit par un groupe de blues anglais qui a traversé le Rubicon.
Et la musique du film Star Wars – c’est vrai c’était aussi cette année là !

Pour évoquer rapidement le contexte de cette période, les deux rives de l’atlantique sont ballotées par la déferlante punk depuis deux ans (Clash, Sex Pistols, Damned, Jam… côté anglais ; Television, Richard Hell, les Heartbreakers, Ramones, Talking Heads, Mink Deville… côté US), épiphénomène en terme financier, tremblement de terre idéologique ; Rick Wakeman dira qu’après le punk, il devint impossible de poursuivre ce qui avait été entrepris auparavant. Fin de parcours pour de nombreux groupes : Yes, ELP, Jethro Tull... ou orientation variété populaire : Santana, Chicago… Mais ici, on ne s’en soucie guère. La protection semble épaisse.

Chacun sait qu’il y a un moment où l’art musical cesse d’être un outil de contestation, un pourvoir subversif, un regard décryptant, une lumière pour l’âme. La musique devient alors une marchandise calibrée, réfléchie plus préoccupée de la perception que de la diffusion. On nomme cela la Variété.

Il y eut dans l’histoire du rock ce passage où ceux qui incarnaient la subversion se laissèrent massivement séduire par les chants de la facilité, fabriquèrent la variété rock et anéantirent l’espoir. 77 est le cap définitif, le point de non retour ; c’est aussi le nom du premier album des Talking Heads.

Q.U.